Avertissement :
1. Avant de faire des bonds, surtout si votre plafond est bas, attendez de lire jusqu’au bout.
2. Sauter ou seulement survoler le paragraphe où le texte est un peu plus clair (et non pas on ne peut plus clair) ne vous fera rien perdre d’essentiel. Inutile de me remercier.
Je hais les pauvres, surtout les SDF. D’abord ça fait désordre dans le paysage en été où ils s’exhibent en spectacle avec leurs chiens, mais c’est pire en hiver où ils font tout pour nous donner mauvaise conscience, leur cul posé à glander à côté des devant les boulangeries et sur le parvis des églises, nous obligeant même à les enjamber, au risque de nous prendre les pieds dans leurs oripeaux.
À part ceux qui savent se tenir, qui sont propres sur eux et qui ne sentent pas mauvais, les vieux me débecquettent. S’ils sont malades –mais les vieux ont toujours quelque chose qui ne va pas–, c’est bien pire.
Les arabes et leurs minarets prétentieux qui défigurent le paysage, faut même pas m’en parler. Pire que les niakoués et leurs chinatowns. Est-ce qu’on va les envahir chez eux avec des clochers et des francetowns ?
J’abhorre les femmes hommasses qui ont du poil aux pattes et des balayettes sous les aisselles, les homos, les travelos, les nudistes qui étalent leurs horreurs et plus encore si ce sont des gros pleins de soupe (et je mâche mes mots), les monsieur muscles avec leurs tablettes chocolat à l’huile de friture et les madame muscles, surtout quand elles causent.
J’ai vraiment du mal à encadrer les peoples pipols, les bimbos et les frimeurs joueurs de pipeau, sauf si je dispose de fil de fer barbelé pour le cadre, avec des pointes acérées qui leur déchirent leurs fringues de luxe, lacèrent leur visage emplâtré, labourent leurs langues de pétasses et de gros cons et leur mettent en charpie leurs prothèses en silicone,
J’ai en horreur les mères chats, les papas poules, les mémés gâteaux, les pépés gâteux, les marmots qui sont sur le pot et qui gueulent que ça y est quand ils ont fini d’empuenter l’atmosphère. J’exècre les parents débiles qui infligent le spectacle de leur moutard quand ils le changent et s’extasient sur la qualité hors pair de la moutarde qu’ils ont produite. Je les supporte encore moins lorsqu’ils citent leur psy –un bon, le meilleur de la place– qui associe cette production nauséabonde à de l’argent ou à un cadeau que le mioche fait à ses géniteurs. Je prends les psy pour ce qu’ils sont ; du coup je n’en dirai pas plus, et je sais de quoi je cause.
J’abomine les jeunes cons chevelus qu’on dirait des gonzesses et qui se trémoussent en jouant de la musique de nègre. J’aime pas les nègres ; ils sont sales et ils puent encore plus que les rouquins qui puent autant que les punks au crâne rasé avec leurs clebards bourrés de puces. Nègre ça devrait être interdit, et rouquins, pas loin.
J’aime pas les gens du voyage, ceux qui font le cirque avec leurs villas à roulettes qu’ils trimballent sur nos routes en provoquant des bouchons et qu’ils se sont achetées je sais pas comment. J’aime encore moins ceux qui ont des roulottes pourries, s’habillent comme n’importe quoi et nous alpaguent sur les parkings pour nous vendre un avenir illusoire de bonne aventure. Je déteste les Roms, surtout les sales gamins morveux qui, sous prétexte de nettoyer les pare-brises, en profitent pour nous voler et s’arrangent pour nous bloquer au feu quand il est vert. Sans compter leur manque de goût et de propreté dans leurs bidonvilles ; quelle horreur !
Je déteste les routiers, les fonctionnaires, les enseignants, les postiers –les postières encore plus–, les agents de la RATP, de la SNCF, les électriciens, les gaziers, les huissiers, les gendarmes. Et les flics.
J’exècre mes parents –Dieu merci ils sont morts– et je hais les morts à cause de ce qu’ils ont fait de leur vivant et à cause de la place qu’ils tiennent encore. Tant qu’à mourir, ils auraient mieux fait de le faire avant d’avoir une quelconque descendance.
Je hais les hommes politiques, les industriels, les syndicalistes, les ouvriers, les élus, les curés, les imams, les nantis du MEDEF pour leur arrogance, les pontes de l’UMP pour leurs mensonges et leur avidité au pouvoir, les têtes pensantes de l’UNESCO pour leur fatuité, les gouvernants pour leur arrogance, les dignitaires de l’ONU pour leur rôle de dame pipi et de voiture balai, les membres du FN pour leur éthique dévoyée et leur mollesse, ces personnages imbus qui annoncent triomphalement CQFD, les naïfs qui clament que tout va bien RAS, ceux qui perdent les pédales et lancent des SOS qui dérangent tout le monde, les auteurs d’ouvrages ABC qui n’apprennent rien, les inventeurs de l’ABS responsables du manque d’organes à greffer, les chirurgiens qui empêchent les AVC de finir leur boulot, les agents d’entretien qui omettent de mettre du Canard WC dans les WC, les généraux de l’OTAN partisans, ceux de l’OTASE qui sont bien là où ils sont, l’OTAGE qui n’avait qu’à rester dans ses pantoufles, les sbires du SP, les oublieux qui écrivent PS en bas de lettre, ceux du NPD, les PD, les tchatcheurs discoureurs réducteurs qui ne savent pas qu’éssèmesse ne s’écrit pas SMS, l’hypocrite qui dit OK tu t’en sortiras au moribond tout en faisant signe au curé pour qu’il lui délivre l’extrême onction, les journalistes et animateurs de télé et radio qui jouent du violon, les patrons de BSA, BSN, du BIT, du CRAP, du DRAP, de la FRAP et ses petites frappes, les moralistes du MRAP, les chanteurs de RAP, les conférenciers qui usent de CAD qui ne font qu’en rajouter à l’incompréhension de ce qu’ils racontent, les discoureurs en panne ou feignasses qui sortent des ETC à tout bout de champ, les trésoriers du FMI avec leurs enveloppes kraft, les DRH pour leur excès d’humanisme, les RTT qui font qu’on circule de plus en plus mal et qui occupent toutes les places assises dans les bistros, les adeptes du VTT qui gueulent comme un putois quand une marmotte les siffle, les partisans des ALN, MLN, FLN qui au final ne libèrent qu’eux mêmes, les concepteurs du code Z et du code Q des radiotélégraphistes, les dépressifs avec leurs TS ratées, les responsables de l’OMS pour leurs mensonges, magouilles et collusions avec les labos pharmaceutiques, les directeurs de la CIA et du FBI pour l’affection toute particulière qu’ils portent à Wikileaks, les notables de la FIFA et du CIO pour leurs crapuleries, le président de la FFCP pour ses poissons d’avril et ses couleuvres, les fouille-merde et les mangeurs de merde, le Congrés qui n’a jamais été foutu de donner un nom aux citoyens des USA, les initiateurs du TGV qui ont mis au rencart les wagons à compartiments, les SDF (mais je l’ai déjà dit), les grands du GAG qui se prennent au sérieux, les pétochards du GATT remplacés par ceux plus cupides de l’OMC, les footballeurs footbrailleurs qui pètent plus haut qu’ils n’envoient le ballon, les bureaucrates qui tracent des POS à géométrie variable, les tenants de l’EURO et les aboutissants de l’Europe, les bénéficiaires des TUC, STUP, RMI, RSA, RAF, POT, TIR, RAT, RUT, PET, SAV… les baratineurs du STRO, du bistro, des chambres consulaires, du Sénat, de l’Assemblée et du gouvernement ; les sportifs de haut niveau, les mineurs de basse extraction, les ouvriers agricoles de basses couches dans les champignonnières, les dealers de bas étage, les nobliaux et autres Monseigneur pour qui je suis loin d’en pincer, les révoltés du Bounty, les naufragés de la Méduse, Adam et Eve, Jacob et Delafon, les emmerdeurs avec leurs photos de vacance… sans compter tous les autres… je hais les gens.
Fondamentalement.
Je n’aime personne, vraiment personne, et je ne m’aime pas non plus.
Un docteur m’avait dit que c’était parce que je suis un peu tout ça à la fois, que coexistent en moi l’ensemble des traits que je prête aux uns et aux autres.
Je lui avais rétorqué « Ça m’étonnerait, parce que je ne prête jamais rien. Manquerait plus que ça !»
« On ne peut haïr que ce qu’on sait nous appartenir également » m’explique à chaque séance –en long en large et en travers– le psychiatre de la clinique.
«Si on n’aime pas quelqu’un, c’est qu’on reconnaît en lui quelque chose qui nous appartient et qui nous déplaît. Votre guérison passera par le fait de bien comprendre que vous vous reconnaissez en chacun de ceux que vous détestez, puis de l’admettre et l’avouer. De vous à vous et à la société.
«Des conneries, rien que des conneries » je lui dis à chaque fois. « C’est pas à moi qu’il faut faire avaler ça ! »
La séance terminée, je remets mes pantoufles, fais mine d’avaler les cachetons qu’il m’a donnés, et salut. Direction l’aile schizo.
«Vous commencez à me courir sur le haricot et je vais finir par vous détester » m’a-t-il dit un jour.
Du tac au tac je lui ai simplement répondu : « Ah bon? Tiens, tiens… »