Tac tac tac tac etc. fait la pluie, one ze rôde eugueïne. Ça roule pépère, du 180 à l’heure. Faut pas croire, mais une deudeuche gonflée à bloc à la gnôle, ça dépote, comme dit mon pote Gégé, céramiste de son état. Gégé, il est du midi, comme moi, alors qu’on nous emmerde pas si on en rajoute un peu.
Tac flop tac flop fait la pluie. Les flop, c’est les grosses gouttes de pluie qui s’écrasent sur la capote qui ne l’est pas encore, malgré ses 40 ans d’âge. Je sais, c’est capot qu’on dit, à cause que c’est une flexion invariable, non mais qu’est-ce que vous croyez ?
Tac flop tac flop tac tac flop spalsh et anti-splash, one ze rôde eugueïne. Le ruban asphaltique défile sous le plancher. Dans pas une heure on aura parcouru les 90 bornes d’autoroute qui nous séparent de là où on se rend, conséquence navrante de notre défaite au picole-dames qui nous oblige à rendre les armes malgré notre réticence. C’est vrai, quoi, payer le restau à deux gugusses qui, à tous les coups, ont triché, merci. Bref, on a retenu une table chez Fred, un mâchon de haut vol, comme la note qu’on nous y présente, salée.
Tac flop tac fop tac tac flop splalsh splash tac tac, one ze rôde eugueïne. Les splashs, c’est des saloperies de flaques, mais avec la deux-pattes, pas de risques qu’on aquaplane. Plus que 5 bornes, et on y est.
Fshhhhhhhhiiiiiiii-i-i-i-iiiii tacapoum tacapoum. Tacapoum, c’est quand on freine sec et que la guimbarde joue les cabris. Du rouge orangé devant nous, file ininterrompue.
Merde, on s’est fait baiser grogne Gégé en essayant tout de même de se faufiler entre les bagnoles. Sauf que l’autoroute, c’est pas fait pour le cabotage. Du coup, bien obligé de panurger en lambinant.
On est à combien ? il me demande. 4 bornes 950, à un poil près, il se répond. Me dites pas que ça ne vous arrive jamais de vous répondre, parfois même en conjectures. Répandre ? Si vous y tenez…
Deux panneaux de Noël clignotti, clignotta, nous informent que c’est un bouchon, au cas où on ne s’en serait pas aperçu. Un en haut, l’autre en bas, noyé dans l’asphalte. Pareil pour les bagnoles qui viennent de faire des petits. C’est tellement beau qu’on en est tout aveuglé. Joie suprême, on est à l’arrêt, ce qui permet d’en prendre à loisir plein les mirettes. Une pure merveille.
Sur place. On fait du sur place. Un sur place entrecoupé de quelques sauts de puce quand un conducteur qui baîlle aux corneilles ou s’enguirlande avec sa copine –une pichenette–, nous rentre dedans. Ch’tavais dit de pas prendre la rocade, mais monsieur en fait qu’à sa tête. Sauf que le monsieur, il sait pertinemment qu’il n’y a pas d’autre solution. On te dégomme les petites routes qui entraient en étoile dans l’agglo, on te bricole des rocades à la con, entonnoirs et goulots d’étranglement, et démerde-toi avec ça.
On est à combien ? se redemande Gégé. 4 bornes 940 je lui réponds en lui coupant l’herbe sous le pied.
Nos 4 bornes 940, on a mis une heure pour les parcourir. L’allure d’un petit marcheur fatigué. Les potes n’ont pas fait mieux, et le patron du restau s’attendait à pire. Et encore vous vous en êtes bien sortis, il nous rassure en prenant la commande des apéros. Une Rocade ? il nous suggère. Va pour la Rocade, on lui répond.
Quoi ? Vous ne connaissez pas ? 1/3 de Martini blanc dry, 1/3 de Gin, 1/3 de San Pellegrino, 2 pruneaux d’Agen, 3 ou 4 grains de muscat, plus une olive verte. À avaler cul-sec. C’est ça, la Rocade.
Avec les noyaux ? À vous de voir, mais si vous voulez un conseil, essayez d’abord sans.