L’ombre de l’UMP : un monde ramené au néant

Avant, quand je m’étais engagé dans la Milice parce que la Résistance n’avait pas voulu de moi sous prétexte qu’en 18 mon père avait été décoré par Pétain, on avait d’abord été très gentil avec moi, peut-être à cause de services que je rendais aux uns et aux autres puis, quand le vent avait tourné, parce que toujours le vent tourne, on s’était détourné de moi, on avait chuchoté dans mon dos, on m’avait désigné d’un doigt vengeur, puis on m’avait pendu.
Avant, quand j’avais pris ma carte au Parti Communiste et que j’en étais devenu un responsable pour m’offrir des vacances à l’œil dans une datcha de la Mer noire, les gens changeaient de trottoir quand ils me croisaient, balançaient des pots de peinture rouge sur la porte d’entrée de mon appartement, et le curé avait refusé de faire faire leur communion à mes gamins.
Avant, quand j’avais milité au sein de Laissez les Vivre, parce que j’étais contre l’avortement, en même temps que je soutenais le MLF et que je travaillais au Planing familial, je me faisais prendre à partie de tous bords jusqu’à ce que, petit à petit, toutes les portes se ferment devant moi. Du coup je m’étais fait ermite.
Avant, quand je m’étais fait ermite pour ne plus avoir à m’interroger sur les vicissitudes de la vie, les télés, radios et la presse écrite débarquaient sans cesse dans la grotte que j’avais sommairement aménagée pour m’interviewer sur cette drôle de vie que je vivais sans confort, retiré du monde et coupé de toute vie sociale. Alors j’étais tombé malade et je m’étais endormi pour toujours.
 Avant, quand je m’étais fait homosexuel pour embistrouiller les culs serrés infoutus d’avouer qu’un petit suppositoire dans le derche ne fait pas de mal, tout compte fait, on me tombait dessus à bras raccourcis en me couvrant d’injures dont une, pédé –abréviation de pédéraste–, quelque peu déplacée, les enfants, avec leur manque d’expérience, ne m’ayant jamais intéressé.
Avant, à une époque où, toute jeune j’avais couru le vaste monde pour en découvrir toute sa diversité, j’avais eu les pires ennuis avec la justice du Blennoragistan, un pays perdu aux confins du vide qui s’étend tout au bout de la Terre. La baisse de natalité avait amené le pouvoir en place à édicter une loi obligeant les jeunes filles nubiles à enfanter, loi qu’ignorait l’étrangère de passage que j’étais. Accoutumée aux lois de mon pays d’origine qui, à cause d’une surpopulation à la fécondité remarquable, interdisaient tout rapport sexuel avant complète maturité physiologique et psychologique – maturité fixée à l’âge de 25 ans–,  le ventre plat de la jeune fille nubile de 12 ans que j’arborais était pure provocation aux yeux de la population locale qui n’avait pas tardé à me dénoncer. J’avais été promptement traduite en justice puis conduite en un lieu ou j’avais été tout aussi promptement engrossée.
Avant, quand j’avais adhéré au Front National pour faire caguer les bobos qui se la jouent bohème mais pètent dans la soie et suivent les cours de la bourse en attendant que tombent les dividendes dans leur escarcelle d’airain, on me traitait de réac, de pétainiste, de facho et quand on m’interviewait, mystères de l’électronique, les micros tombaient en panne.
Avant, quand je prenais parti pour Kadhafi ou Bachar al-Assad, histoire d’emmerder BHL et ces soit-disant libéraux, chantres chancres de la démocratie et d’une morale occidentale dévoyée guidée par le profit que les vieilles puissances à bout de souffle pouvaient tirer de régimes où le libéralisme mercantilisme serait roi, on brûlait d’envie de me lapider et, ce qui est supposé arriver arrivant, on me lapida.
Avant, quand j’étais devenu avocat pour défendre les indéfendables salopards coupables de quelques viols, meurtres et autres gentillesses, je possédais sans doute la plus vaste collection de crachats qu’on eut jamais vue. Une violente explosion m’expédia ad patres en même temps qu’elle envoya ma BMW à la casse.
Avant, quand je trouvais scandaleux qu’on publie les caricatures du Prophète et celles du pape que j’avais habilement dessinées de ma main, la presse libertaire me houspillait, tandis que celle liberticide m’encensait pour ma courageuse prise de position. Mon éditeur ayant vendu la mèche pour une somme rondelette à un journal catho intégriste en même temps qu’à un groupuscule proche des Frères musulmans, je n’eus pas le temps de savoir à quoi je dus la mort : à l’impact dans le crâne d’une balle de 7mm ou à la profonde entaille que fit un coutelas dans ma gorge.
Avant, quand je battais ma femme ou mes gosses si, au lieu d’être à la maison elle traînassait je ne savais où…
Avant, quand j’avais un emploi, que je servais à quelque chose et aussi à moi-même pour pouvoir me nourrir…
Avant, quand j’étais récompensé par une belle médaille pour le meurtre d’un inconnu qui avait eu le tort de ne pas tirer le premier…
Avant, quand on m’avait mis aux fers pour avoir chipé une pomme…
Avant, quand on m’avait guillotiné pour avoir tué un marchand d’esclaves…
Avant, quand on m’avait honoré pour m’être enrichi grâce au trafic d’esclaves d’ébène…

Mais ça, c’était avant.
Aujourd’hui, plus rien n’a d’importance, ni de poids, ni de profondeur, ni de goût, ni de couleur, ni de texture, ni de dimension.
Aujourd’hui, une ombre terrifiante occulte passé, présent et devenir, plongeant le monde dans les ténèbres et l’oubli, le ramenant au néant.
Elle a déployé ses ailes, elle emplit l’espace, elle se nomme UMP.

A propos pierrevaissiere

On avait réussi à collecter une dizaine de mots qui parlent de l'olibrius qui écrit ces âneries, et voilà, ils se sont échappés. C'est pourtant pas faute de les avoir tenus en laisse.
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2 commentaires pour L’ombre de l’UMP : un monde ramené au néant

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