Sans enfant, j’avais décidé d’en adopter un. Je voulais un petit Français, même s’il n’était pas tout neuf, pas par racisme mais parce que j’ai toujours été incapable de parler une langue étrangère. La commande passée, j’ai attendu deux ans avant qu’on me dise que, comme je vivais seule, je n’avais le droit qu’à un petit étranger, de couleur, issu d’un des pays les plus pauvres, et j’en passe. Bref, le rebut. Du coup j’ai annulé ma commande.
Depuis je me suis acheté un chien. Mais comme c’est un berger allemand, j’ai du mal à me faire obéir, à cause que, comme je le dis plus haut, les langues étrangères c’est pas mon fort. Cependant je ne désespère pas l’amener à comprendre le français, quitte à ce que je me fasse des cors aux pieds à force de lui botter le cul, un tennis elbow à force de lui lancer la baballe et une luxation de l’épaule à force de le tabasser à coups de trique. Je ne suis pas chienne, et consciente de ses racines teutones, je lui ai déniché une bonne schlague qu’un voisin retraité buraliste, un ancien collabo, avait reçu des mains mêmes d’un dignitaire nazi en remerciement de sa fidélité au régime d’outre rhin. Un bien bel objet : manche en os, prolongé de nerfs tressés, mieux qu’un nerf de boeuf, frappé d’une croix gammée et des initiales WSS. Origine garantie, m’a affirmé le buraliste, elle vient d’un lot fabriqué à Mauthausen, en 1942. Tu devrais l’appeler Wolf-Sturm-und-Schlag, ton clébard. Ça sonne bien et à mon avis, ça pousse à l’obéissance. J’ai décidé de l’appeler Wolf, mais quand monsieur fait la sourde oreille et me désobéit, un Wolf-Sturm-und-Schlag a vite fait de le mettre au pas de l’oie.
Les bêtes c’est pas plus compliqué à dresser que les enfants.
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