Selon notre correspondant au Blennoragistan, en l’occurrence moi-même qui y étais il y a moins de temps qu’il n’en faut pour le dire et surtout pour en revenir fissa avec les forces de police locales aux fesses, un accord majeur aurait été signé entre le Président de ce pays et le Président de l’Assemblée du Mahagoni, une province du Yakmoakiconte, frontalière du Tüpøtegrathai.
Un accord ? Tiens donc !
Un accord majeur, ça doit sonner juste, et pas qu’un peu, mon n’veu. Déjà il faut une dominante, elle y est, c’est le Yakmoakiconte, une charmante dictature où je m’étais déjà rendu il y a quelques années, je devrais dire un siècle. Ce qui fait qu’il y a un dominé, logique : la charmante province au nom poétique de Mahagoni, une consonance qui pourrait faire penser à un pays de cocagne, sauf que… Dominante qu’on appelle aussi la fondamentale, pour ne vexer personne, encore que, une des parties étant fondamentale, l‘autre a de fortes chances d’être insignifiante. Il faut aussi une tierce avec quatre demi-tons qui la séparent d’elle. Puis une quinte. Celle-là, pas de doute qu’elle y est, car les accords, majeurs ou pas, autant savoir que ça en fait tousser plus d’un. La tierce, je ne sais pas exactement ce que c’est ; cependant m’est avis que ça doit ressembler à un témoin ou à un troisième larron que l’on a fait venir pour compter les points et faire le loufiat, ce dont cette région d’Asie centrale ne manque pas. Maintenant, je ne veux pas dire que l’accord ne soit pas majeur, non, ce que je veux dire, c’est que c’est un accord de dupes. Entre celui qui a proprement entourloupé l’autre, et l’autre qui sait qu’il s’est fait baiser, mais qui aime ça, fait semblant de l’aimer, ou se contente de plaire pour continuer à exister. En cela, on peut dire qu’un tel accord est non seulement majeur, mais parfait.
Celui qui l’a dans le baba, le dupé, lésé, défavorisé, pénalisé, apprécie jusqu’à ce que, à force de trop se faire baiser et passer son temps à appeler SOS plombiers pour se faire refaire la tuyauterie, il se mette à regimber. Le salopiot qui ne tient pas sa parole, ni ne la retient.
Les discordances s’affichent au grand jour, les couacs s’enchaînent, et malgré les milices de surveillance qui contrôlent les cals que les citoyens se font au creux des mains s’ils font bien sagement la claque à leurs chefs tant aimés, plus personne n’applaudit aux prestations des cliques politicardes d’où s’envolent dans les cieux encore cléments de jolis canards. Plus personne ? Si : les marchands de canons, car on affute les prétextes pour préparer la guerre. Et peu importe qu’elle oppose les ressortissants d’un même pays ou qu’elle se porte au-delà des frontières, les guerres civiles comme les conflits internationaux présentant les mêmes intérêts pour les charognards.
L’argent étant le nerf de la guerre, et avec le soutien de la presse sous pression, on en fabrique si les presses d’état sont en état, on le vole au peuple sinon. Et le retour sur investissement étant acquis, l’argent circule comme jamais, en toute discrétion, pour aller remplir les escarcelles des seigneurs de la guerre et des faucons qui l’auront prônée.
Dieu merci, cela ne risque pas d’arriver chez nous, en Europe et moins encore en notre douce France, où règnent la liberté, l’équité, l’ordre, la justice, le Camembert, le rouquin, les animateurs télé comme Anona (un nom qui ressemble à ça), Routier (me semble-t-il), un certain Casta je ne sais plus quoi, plus quelques autres animateurs de second plan, genre commis de l’état à deux balles, qui ont élevé leur inculture au rang de valeur républicaine et l’ont mise au service de la nation. À l’instar de cette joueuse de flûtiau, une jeunette au prénom prédestiné qui présente un numéro de charmeuse de serpents, ou de ces illusionnistes dont le tour consiste à faire prendre des vessies pour des lanternes – et ça marche, comme s’il y avait un accord (majeur) implicite. Preuve s’il en fallait qu’élever des ânes et des moutons est à la portée de n’importe qui, pour peu qu’il sache mettre de la poudre aux yeux d’un public et lui bonimenter des sornettes. Et, miracle de la démocratie, plus la nourriture est frelatée et bourrée de somnifères, moins le peuple se révolte ; et plus le peuple est anesthésié, plus on lui sert du vent et de la médiocrité. En somme, un conflit tout en douceur (comme quoi, nos démocraties ont du bon), le contraire de ce qui se passe du Blennoragistan au Yakmoaquiconte et au Tüpøtegrathai où le but est pourtant le même qu’ici : l’asservissement du plus grand nombre au profit de quelques uns (auto-) déclarés élites et élus.
Tu en dirais quoi, Charlie, si tu t’es remis de ta lobotomie ?
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